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17 mars 2005

Avant la nuit

Arenas, Reinaldo (1992) Avant la nuit. Autobiographie. 440 pages.

J'ai attendu quelques jours avant de faire ma critique, car souvent, après avoir digéré un livre, j'ai des opinions un peu plus mesurées et aussi parce que je voulais faire quelques recherches sur Arenas.

Avant la nuit est donc l'autobiographie de Arenas, un écrivain cubain atteint du sida, qui s'est suicidé en 1990. C'est évident que je ne peux pas juger ou critiquer "la vie" de l'auteur. Il a vécu 10 vies dans une si l'on se fie à son livre et à l'information que l'on retrouve dans Internet et dans les livres. Né très pauvre, il a réussi à s'élever dans la société cubaine en tant qu'écrivain, mais il est vite retombé à cause de son homosexualité et de son train de vie extrêmement rebel... Son histoire est souvent drôle, souvent pathétique, souvent triste. On ne peut lui reprocher d'avoir essayé de survivre en s'amusant et en prenant du bon temps! Il est gai et s'assume! J'ai adoré le côté historique de ce livre. J'en connais si peu à propos de Cuba qu'il était très intéressant d'en découvrir le côté "plus noir".

Ce que je continue de penser, par contre, est que son autobiographie est très mal "écrite" ou "exprimée". Mais encore là, je suis prête à admettre bien des choses : Reinaldo était mourant quand il a terminé Avant la nuit et ne pouvait même plus écrire. Il dictait son histoire dans un magnétophone et un ami (Lazaro) la transcrivait. 1) Imaginez-vous en train d'écrire un texte relatant une anecdote qui vous est arrivée et 2) imaginez-vous en train de raconter cette même anecdote à des amis. C'est sûr et certain que le résultat ne sera pas le même. Je pense que c'est évident à la lecture de ce livre que le rythme de l'histoire est souvent "oral". Pour certains, ça ne fera pas de différence. Pour moi, j'ai trouvé que ça coupait le rythme, et les retours ou cassures pour me parler de la grosseur de la queue d'une conquête pour tout de suite après retomber dans la description de la ville m'ont horripilée. Je tiens à dire que ça n'a rien à voir avec le sexe; s'il avait coupé ses descriptions pour me parler du chat de la voisine à chaque chapitre, j'aurais trouvé le style pesant aussi.

Aussi (et là je m'avance, j'ai peut-être TRÈS tort), mais comme je l'ai dit, Reinaldo était mourant, prenait des médicaments et de la marijuana pour alléger ses souffrances, et il est certain qu'il n'avait pas l'esprit toujours très clair pour organiser un texte. Moi, je le vois comme ça. Vous n'arriverez jamais à me faire penser que ce livre est un exemple de grande littérature! Ça n'enlève RIEN à l'histoire d'Arenas, à sa vie, à son oeuvre, mais ce livre en particulier, côté stylistique, est à mon avis très mauvais.

Je pense aussi qu'Arenas a voulu consciemment choquer, se venger avec ce livre. En fait, il le dit lui-même si vous cliquez sur le lien ci-bas. Eh bien parfois, à trop vouloir presser le citron, on se ramasse avec les pépins... Comme d'autres avant moi, j'ai trouvé qu'il en mettait tellement parfois qu'il devenait absolument non crédible... Selon son livre, TOUT le monde est gai à Cuba, tout le monde veut baiser avec lui, tout le monde vit une double vie sexuelle, toutes les femmes veulent baiser avec des gais, etc. Je ne suis pas Cubaine ni gaie, alors peut-être ai-je tort, mais quand même... Aussi, et là je m'aventure encore, j'ai trouvé que parfois, il dénonçait des gens, des auteurs, il racontait des bouts de vie très intimes de personnes autres que lui, mais excusez-moi, c'est très facile de faire ça quand on sait qu'on va mourir dans quelques semaines/mois... C'est plus difficile de le faire quand on sait qu'on aura à répondre à nos affirmations... Enfin, c'est ce que je pense. Par exemple, dans le chapitre qui parle de Virgilio Pinera, il passe 3 paragraphes à nous parler des aventures sexuelles de Pinera avec les Noirs : "Un autre Noir avec lequel Virgilio avait eu des relations sexuelles assez suivies était un cuisinier qui, disait-il, avait un sexe énorme. Le plaisir de Virgilio était d'être pénétré par ce qui cuisinier qui manipulait marmites et louches, et continuait à faire la cuisine tout en ayant Virgilio embroché à son sexe". Vous trouvez ça pertinent ici de raconter les histoires intimes de quelqu'un d'autre?

Finalement, je suis allée faire un tour à la bibliothèque de l'Université pour fouiller dans les anthologies de littérature cubaine. On parlait d'Arenas parfois, pas toujours. Même dans des documents sur la littérature homosexuelle à Cuba ou bien sur la sexualité dans littérature cubaine, il n'y était pas tant que ça... Peut-être est-ce simplement des guerres intestines qui font qu'il n'y est pas, je ne sais pas. Mais à la fin de son autobiographie, Arenas dit lui-même, qu'une fois exilé, une fois aux É-U, il était pas mal moins intéressant pour les gens/éditeurs : on ne voulait plus publier ses livres, car il n'était plus un écrivain opprimé/prisonnier, etc. Alors là, voilà la grande question : est-il un écrivain SI reconnu que ça? Ou bien a-t-il eu tous ces honneurs, cette attention car il était prisonnier, etc? Je ne sais pas et je n'ai même pas d'opinion en fait et je m'aventure beaucoup trop ici de toute manière.

Voici un lien très intéressant sur Arenas. C'est un ami écrivain d'Arenas qui l'a interviewé quelques jours avant sa mort : http://www.actupny.org/diva/CBmanrique.html

Ma note : 3/5.

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